Parlons-nous de la même chose ?

Bonjour à toutes et à tous,

Oui, la manière dont nous nommons le monde influe ensuite énormément sur la manière dont nous le pensons. Puis sur la manière dont nous nous comportons vis à vis de ce monde approximatif que nous nous sommes créés mentalement.

Pour la grande majorité d’entre-nous, cette création repose en vérité sur des couches superposées de sédiments mentaux : le résultat des multiples créations et des inventions cumulées, toutes issues de l’esprit fertile de nos vénérables prédécesseurs sur cette terre. En remontant s’il le faut jusqu’aux premiers pionniers qui osèrent défricher les sombres forêts d’Europe, voir au delà.

Même quand nous croyons créer, nous le faisons généralement en utilisant le matériel mental déjà disponible dans les grandes annales de l’humanité. Ce que certains appellent « l’inconscient collectif ». Mais les véritables créateurs sont rares. Peut-on dire d’ailleurs qu’ils le sont vraiment, puisque leurs découvertes les plus révolutionnaires découlent, d’une manière ou d’une autre, d’une intuition venue d’ailleurs. Ailleurs que l’intellect en tout cas.
Il s’agit ici de faits démontrés empiriquement et les témoignages de savants abondent en ce sens.

Les grandes découvertes viennent ainsi spontanément par l’intuition. Sans effort et dans un moment de calme et de décontraction. Ainsi le fameux « Euréka » d’Archimède, tout occupé qu’il était à se délasser dans son bain.

Le travail et le savoir faire du savant ainsi visité par une intuition géniale, sont ensuite bien utiles pour valider cette intuition en la confrontant aux données expérimentales. Ce qui est sur, c’est que les choses se passent bien dans ce sens : intuition, puis construction mentale afin de vérifier cette intuition.
Et nous savons qu’un jour ou l’autre, les différentes physiques (newtonienne, quantique, etc…) pourront se rejoindre en une compréhension globale et cohérente de l’univers.

Mais nous n’en sommes pas encore là. Et les freins qui retardent cette grande synthèse annoncée sont avant tout sémantiques. Si l’on ne se comprend pas sur les mots, comment pouvons nous espérer nous comprendre sur les idées ?

Tout ça pour dire, j’en reviens aux plantes, que je vois très bien où veux en venir Olivier Barbié (le fondateur de l’Institut Technique d’Agriculture Naturelle) et que je suis entièrement en accord avec son point de vu quand, à propos d’un concept aussi évident que celui de plante, il dit :

« Le noeud de la question, c’est se mettre d’accord sur les limites anatomiques de l’individu végétal. Je soutiens que le végétal n’est pas formé d’individus au sens où les humains entendent ce terme. »

Il propose donc une formulation plus adaptée aux principes même de l’agriculture naturelle. De fait, ce nouveau regard sur ce qu’est une plante, est en léger décalage avec l’image d’Epinal que nous nous forgeons collectivement quand nous parlons des plantes.
Et ce n’est pas là que jeux de mots et découpage de cheveux en quatre, car cette nouvelle façon d’envisager le végétal est aussi et avant tout plus juste.

Ce qui apparait évident lorsque l’on se confronte uniquement à ce qui EST dans la réalité. Sans pensées parasites. Juste nos sens, l’air et la plante directement…

Prenons nous encore le temps, entre deux bouquins de jardinage et trois fiches botaniques, de nous assoir tranquillement face à une plante, et de lui demander : « qui est-tu ? ».

Je réagis à cet échange, car en étudiant le comportement des plantes et en prenant conscience de l’importance du sol pour leur équilibre écologique (et vice versa), j’en étais venu à penser que les plantes avaient la tête en bas et l’estomac à l’extérieur du corps. Quand aux poumons, à bien y regarder, ils sont eux aussi externes et ils se déploient vers le soleil.

Ce qui n’est pas si absurde dans le fond.

Physiologiquement, tous les animaux descendent des premiers cordés. Ce sont à l’origine de petits anneaux vivants de cellules agglomérées, qui se sont allongés au fil du temps en répliquant ce modèle de base. Une forme que l’on retrouve chez beaucoup de larves d’insectes, ou chez les lombrics en particulier.

Nous autres humains ne sommes en définitive que des estomacs sur patte super-évolués.

L’intestin est d’ailleurs la partie du corps qui se forme en premier chez l’embryon humain, et tous les autres organes découlent par migration cellulaire de cette première structure centrale.
Ce n’est donc pas qu’une image ou qu’un jeu de mot, ni même une forme de dénigrement vis à vis de l’être humain, quand je dis que nous sommes des estomacs ultra-perfectionnés. Tout semble bien indiquer que c’est bien le cas, n’en déplaise à nos cerveaux gonflés d’orgueil et de vaines certitudes (remarquez que je ne parle pas de vous, mais de nos cerveaux).

Contrairement aux idées reçues, nos intestins et notre cœur sont ce qui soutient nos processus mentaux et notre intellect. Ce que savent bien les yogi qui méditent profondément sur leur corps. Les scientifiques devraient bientôt révéler au grand publique (petit morceau par petit morceau) ces secrets d’alcôve qui n’en sont déjà plus vraiment.
On se contente aujourd’hui de dire que l’estomac est un deuxième cerveau, pour ne pas brusquer les consciences. Mais la réalité, c’est que sans l’estomac pour nous nourrir, et dans une moindre mesure, sans le cœur pour mettre les nutriments en circulation dans le corps, tout le bel édifice s’effondre.

Bon nombre de troubles psychologiques peuvent d’ailleurs ainsi être résolus presque miraculeusement, en soignant tout simplement les intestins.

En tant que membre du règne animal, nous faisons passer les nutriments par notre lumière intestinale (l’estomac étant une portion spécialisée de ce « tube »), et ce sont les intestins qui font ensuite tout le boulot, pour qu’en fin de chaine, nos cellules soient nourries. Tout ce que nous ingérons pour nous nourrir passe par notre bouche, et ce dont nous n’avons pas besoin ressort par notre anus. Quant aux reins, ils sont chargés d’évacuer les déchets métaboliques produits à même le corps, ainsi que les trop plein de toxines liés à une alimentation mal adaptée.

C’est très schématique, mais nous retrouvons cette constante dans tous le règne animal.

Vous allez comprendre pourquoi je vous parle des animaux quand le sujet est les plantes et le sol. J’y viens :

Penchons nous maintenant sur le cas particulier des araignées : elles capturent leurs proies dans leur toile, les endorment, puis elles injectent l’équivalent de nos sucs gastriques dans le corps de l’insecte capturé. Ensuite, elles n’ont plus qu’à attendre que les acides agissent et liquéfient les chairs, avant d’ingérer tranquillement le produit de cette digestion externe.

Les araignées auraient-elles redécouvert une stratégie déjà adoptée par les plantes des millions d’années avant elles ?

Je reprends cette partie du message d’Olivier Barbié qui rejoint et vient confirmer mon intuition :

« Dans le sol, la limite entre couche morte et substrat est particulièrement floue. Au point qu’il est difficile de dire où s’arrête la plante. C’est comme si leurs viscères étaient invaginées. Imagine que ton ventre soit ouvert vers l’extérieur au lieu d’être un sac ? Où commencerait et où finirait ta flore stomacale ? Que penser des déchets de digestion ? Des cellules épithéliales mortes ? Des sucs digestifs rejetés dans environnement ? Surtout si tu vivait dans l’eau ? Notre point de vue est trop anthropocentrique. Je crois que c’est pour cela que nous avons tant de mal à comprendre les plantes et du même coup la nature exacte de ce qu’est le sol exploré par les racines. »

(C’est moi qui souligne)

J’ajoute que nous ne nous comprendrons pas vraiment nous même, en tant qu’espèce et en tant qu’individu, si nous ne changeons pas aussi le regard que nous portons sur nous même.

Et si l’on prend un peu le temps d’y réfléchir, il apparait que nous ne sommes pas, comme la plupart d’entre nous le croient, des cerveaux dotés d’un cœur et d’un estomac. Nous sommes avant tout des estomacs, plus un cœur, dotés d’un tas d’organes, dont le cerveau, et capables de développer un intellect puissant.
La nuance est de taille.

Remettons les choses dans l’ordre, faisons un peu le ménage et redonnons un coup de neuf à nos représentations mentales, et le monde nous obéira à la hauteur de notre propre obéissance envers lui.

J’ajoute que je suis heureux de faire partie d’une école où il est encouragé de remettre en question les prémices même de la discipline étudiée. A la fois étudiant, chercheur et penseur, j’ai le sentiment de vivre quelque chose de véritablement enrichissant, comme si j’étais une sorte de pionnier des temps modernes, et cela sans forcément avoir à quitter la ville.

Merci à Olivier Barbié de nous inviter à partager cette liberté d’esprit qui l’anime. Pour ceux que l’agriculture naturelle intéresse, je redonne le lien vers le site de l’ITAN (Institut d’Agriculture Naturelle) :

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Cordialement,

Oromasus

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